L'histoire de l'encens MUDRA

L'histoire de l'encens

Encens, origines et utilisations

Depuis des millénaires, les effluves puissants ont tissé leur présence au cœur des traditions culturelles. Il n’est guère surprenant que l’odorat, si intimement lié à la mémoire et aux émotions, ait inspiré l’usage rituel et quotidien de l’encens à travers le monde. Ce parfum mystique, à la fois tangible et immatériel, accompagne les hommes dans leurs gestes sacrés et leurs méditations, enveloppant chaque instant d’une aura de sérénité et de profondeur.

L’encens se compose de matières végétales aromatiques, souvent enrichies d’huiles essentielles, qui se transforment en une pâte souple et parfumée. Cette pâte peut être modelée en cônes délicats ou enroulée autour de fins bâtons de bambou ou d’autres supports, prêts à libérer leur essence au contact du feu. On distingue principalement deux grandes familles : les encens combustibles et les encens non combustibles. Les premiers s’embrasent par une flamme, que l’on souffle ou éteint, laissant une braise vivante diffuser lentement son parfum. Les seconds requièrent une chaleur constante, qu’elle vienne d’une flamme continue ou d’un charbon ardent, pour révéler la richesse de leurs fragrances.


L'encens à travers le monde

Depuis l’Égypte ancienne, l’encens accompagne l’homme dans ses gestes quotidiens comme dans ses rituels les plus sacrés.

 

bas relief Égypte antique

Les Égyptiens l’allumaient autant pour masquer les odeurs de la vie quotidienne – il n’existait ni déodorants ni sprays parfumés il y a 5 000 ans – que pour éloigner les esprits malveillants et plaire aux dieux par des fragrances célestes. Des boules de résine parfumée ont été retrouvées dans de nombreuses tombes, témoignant d’un rôle essentiel dans le voyage vers l’au-delà. Les Babyloniens, quant à eux, l’intégraient dans les offrandes aux oracles, tandis que la pratique s’étendait ensuite à la Grèce, célèbre pour l’oracle de Delphes, puis à Rome, chaque civilisation façonnant ses propres rituels autour de ces volutes odorantes.

Sur la photo : un prêtre mortuaire, drapé d’une peau d’animal et d’un long pagne, accomplit le rituel de « l’ouverture de la bouche », moment crucial de la cérémonie funéraire où la momie est symboliquement ramenée à la vie. Derrière lui, une table expose les outils sacrés destinés aux rites. Il effectue une offrande et brûle de l’encens devant la momie debout – absente du fragment – finement sculpté dans la tombe du vizir Nes-pa-ka-shuty. Chaque geste, chaque volute de fumée, relie le monde des vivants à celui des esprits, révélant la puissance subtile mais indéniable de l’encens.

L'encens en Asie

À l’autre bout du monde, en Chine et en Inde, l’encens prend une place de plus en plus centrale dans les cérémonies religieuses dès 2000 avant notre ère. Les prêtres et les moines l’allumaient pour accompagner leurs méditations profondes, purifier les lieux et accompagner chaque rituel sacré d’une atmosphère de recueillement. La fumée qui s’élevait doucement vers le ciel semblait emporter avec elle les prières et les intentions, tissant un lien invisible entre le monde terrestre et le divin, et enveloppant chaque espace d’une sérénité palpable.

"L’encens est la prière des fleurs."
Proverbe indien


Et partout ailleurs dans le monde

Dans le Nouveau Monde – sur les terres qui sont aujourd’hui les États-Unis, le Canada et le Mexique – les traditions de combustion de plantes aromatiques à des fins spirituelles et cérémonielles ont également prospéré, même si le terme « encens » n’y est pas toujours employé. Les chamans et guérisseurs allumaient la sauge, le foin et d’autres herbes sacrées pour purifier, protéger et harmoniser les personnes, les lieux et les objets, tissant ainsi un lien intime entre le monde matériel et les forces invisibles qui l’animent.


"Les parfums, comme les vertus, s’exhalent dans l’air et touchent l’âme."
Théophraste (philosophe grec, 371-287 av. J.-C.)

Les ingrédients utilisés

Le Moyen-Orient moderne est le berceau de ce que nous appelons aujourd’hui l’encens. Les premières traces écrites de son usage proviennent du pays des momies et du Nil – l’Égypte ancienne.

Si cette période est si lointaine qu’il est difficile de connaître avec exactitude les recettes précises des anciens Égyptiens, les archives et quelques indices permettent d’en esquisser le portrait. Les matériaux locaux étaient privilégiés pour leur disponibilité : foin, papyrus, miel, mais aussi mastic issu de résine de bois et sucres tirés des dattes et raisins secs, qui donnaient à la pâte parfumée l’adhérence nécessaire pour être façonnée.

Pour les encens les plus précieux, cependant, il fallait se tourner vers l’importation. Le bois aromatique étant rare en Égypte, les pharaons organisaient des expéditions commerciales vers le Levant, l’actuel Liban, afin de rapporter le cèdre odorant. Plutarque, essayiste et historien grec, rapporte que les Égyptiens brûlaient l’encens au matin, la myrrhe à midi, et le "kapet" ou "kyphi" – mélange complexe d’ingrédients – le soir. Certains dieux avaient leurs affinités parfumées : Hathor avec la myrrhe, Anubis avec le Storax, encens sacré brûlé à la tombée de la nuit pour la protection.

L’oliban et la myrrhe, tout comme la cannelle, la cardamome et le galbanum, étaient importés pour satisfaire la demande religieuse et rituelle. Ces ingrédients étaient broyés et déposés sur des charbons ardents, façonnés en boulettes à l’aide de résines ou brûlés tels quels, libérant une fumée parfumée qui flottait dans les temples et palais.

Dans des temps plus récents, le "bakhoor" perpétue cette tradition dans le monde musulman : mélange d’encens, de bois de santal et d’huiles naturelles, il est allumé dans un brûleur appelé "mabkhara" pour accueillir les invités. La fumée parfumée, passant d’un convive à l’autre, devient alors un geste de salutation, d’hospitalité et de respect.


L'encens et la myrrhe dans la tradition chrétienne

Il serait impossible de parler de l’encens sans évoquer son rôle dans les premières traditions chrétiennes.

encensoirs

Les trois rois mages, venus honorer la naissance de Jésus, offrirent en cadeaux l’or, l’encens et la myrrhe, symboles de richesse, de divinité et de souffrance à venir. Bien avant cela, brûler de l’encens faisait déjà partie de la liturgie juive, favorisé par les routes commerciales du Moyen-Orient qui facilitaient l’accès à ces précieuses résines. Au-delà de sa dimension spirituelle, l’encens révèle aujourd’hui ses vertus bienfaisantes sur le corps et l’esprit : l’arôme de l’huile d’encens, lorsqu’il est inhalé, semble apaiser le stress, ralentir le rythme cardiaque et faire baisser la pression sanguine, un témoignage moderne de son pouvoir ancien et intemporel.

"L’encens transforme un simple lieu en sanctuaire."

Ketorat

La communauté juive, bien avant l’Exil babylonien (586-538 avant J.-C.), importait l’encens d’Égypte pour ses usages rituels.

prêtre utilisant encens

À un moment donné, elle développa une composition unique, brûlée dans les temples de Jérusalem avec soin et dévotion. Le Livre de l’Exode en décrit les ingrédients : stacte, onyx, galbanum et oliban, un mélange sacré destiné à envelopper le sanctuaire d’une fragrance divine. Aujourd’hui, l’encens ne conserve plus qu’un rôle symbolique dans la pratique du judaïsme, mais son souvenir persiste dans l’histoire des rites et des parfums sacrés.

Ici, le grand prêtre Aaron préparant un encensoir.

 

L'encens en Europe

Le mot « encens » lui-même dérive du latin incendere, qui signifie « brûler ». La civilisation européenne, en contact avec les cultures anciennes comme celles des Égyptiens et des Babyloniens, a hérité de nombreuses traditions liées à l’encens. Les pratiques rituelles et religieuses, les recettes et les méthodes de combustion ont ainsi voyagé depuis le Moyen-Orient jusqu’en Grèce et à Rome. Mais l’Europe possédait également ses propres ressources aromatiques : de nombreuses plantes parfumées poussaient naturellement en Grèce, en Bulgarie, en Italie et ailleurs sur le continent, offrant aux habitants un riche éventail d’herbes et de résines.

Dans le nord de l’Europe, plus éloigné des influences moyen-orientales, les païens utilisaient le genévrier – baies, résine et bois – pour repousser les mauvais esprits, protéger leur foyer durant les longs hivers et accompagner les rites funéraires. Chaque volute de fumée, qu’elle s’élevât dans un temple ou autour d’une maison isolée, portait alors une double promesse : celle de protection et celle de connexion avec le monde invisible.

 

L'encens en Asie

L’Asie évoque souvent immédiatement l’image de l’encens pour beaucoup de personnes. Les nations asiatiques – Inde, Chine et Japon – possèdent certaines des traditions les plus anciennes et les plus raffinées au monde, où l’encens accompagne aussi bien les cérémonies des élites que la vie quotidienne des populations.

L’abondance d’arbres et de plantes odorantes à travers le sous-continent indien et l’Asie de l’Est garantissait un approvisionnement presque infini en matières premières. Au fil du développement des civilisations et de l’essor du commerce, les marchands chinois et indiens échangeaient soie, épices et résines précieuses le long de la route de la soie, découvrant de nouveaux végétaux aromatiques – encens, myrrhe et autres trésors olfactifs – qu’ils ramenaient dans leurs contrées.

Dans ces sociétés, l’encens devint un pilier des pratiques religieuses et spirituelles, tant chez les prêtres et moines que chez les habitants des campagnes. En Inde, les Vedas – anciennes écritures sacrées hindoues – détaillent son usage médicinal et spirituel. Dans la tradition ayurvédique, créer un environnement parfumé et harmonieux constituait l’une des premières étapes du processus de guérison, et l’encens était préparé avec minutie par moines et médecins. Les ingrédients étaient choisis selon les cinq éléments ayurvédiques, et leur combinaison réfléchie révélait l’importance profonde accordée à chaque fragrance, symbole de soin, de protection et d’équilibre.

Chine

En Chine, l’usage de l’encens remonte à 2000 avant J.-C., employé dès cette époque dans des rituels religieux, et connaît son apogée sous la dynastie Song, entre le Xe et le XIIIe siècle, lorsque des bâtiments entiers étaient dédiés aux cérémonies d’encens.

C’est en Chine que naît l’encens en bâtonnets, dépourvu de noyau de bois massif. Il accompagne à la fois les pratiques spirituelles et la médecine traditionnelle : le camphre est brûlé pour soigner les yeux, d’autres résines et épices pour traiter l’estomac ou le cœur. L’art de la fabrication se perfectionne au fil des siècles, donnant naissance aux célèbres « horloges à encens », dont les bâtonnets brûlaient avec une régularité telle qu’ils servaient à mesurer le temps avec précision.

Proverbe bouddhiste :
"Celui qui allume de l’encens éveille le calme et l’attention."

Parmi les ingrédients prisés, le bois de santal occupe une place de choix, hier comme aujourd’hui, parcourant même les routes commerciales vers le Moyen-Orient. Le clou de girofle, le bois d’agar, l’anis et le camphre complètent ce bouquet aromatique, chacun portant avec lui des siècles de savoir-faire et de traditions spirituelles.


Inde

La plus ancienne trace de l’encens dans la culture indienne se trouve dans les Vedas, et plus particulièrement dans l’Atharva-veda et le Rigveda. Ces textes prescrivent une méthode unifiée de fabrication de l’encens, devenue pratique courante vers 700 avant notre ère. Il s’intègre également dans l’Ayurveda, médecine ancienne encore vivante aujourd’hui, où l’encens est reconnu pour ses vertus médicinales. Une grande partie de l’encens était donc à l’origine préparée par des moines, qui l’utilisaient lors des cérémonies sacrées telles que les puja, mêlant spiritualité et soin du corps et de l’esprit.

En Inde, les bâtons d’encens sont appelés agarbatti ou joss sticks. La forme traditionnelle consiste en une pâte résineuse façonnée autour d’un noyau ou d’un bâton de bambou, parfois enrichie de parfums supplémentaires, incorporés ou vaporisés. Cette variété avec tige centrale est typiquement indienne : contrairement à la Chine, au Tibet ou au Japon, où l’on brûle surtout des encens sans support central, elle allie praticité et esthétisme, tout en libérant lentement ses fragrances enveloppantes dans les espaces sacrés ou domestiques. 

Tibet

Au Tibet, l’encens se consommait principalement sous forme de résine brute, mais il existait également une version en corde, obtenue en enroulant herbes et résines dans une tresse, parfois enrichie de parfums subtils.


fabrication de bâtonnets d'encens

Pour les Tibétains, l’encens dépasse le simple usage rituel : il est considéré comme médicinal, ses compositions s’inspirant souvent d’anciens textes ayurvédiques et védiques. Parmi les ingrédients fréquemment employés, on retrouve les fleurs de montagne, le genévrier, l’ashwagandha, le cèdre, la citronnelle, ainsi qu’une multitude d’autres substances odorantes locales.

Le parfum des encens tibétains se caractérise par une richesse terreuse et herbacée. Les formulations peuvent intégrer trente ingrédients ou plus, et parfois dépasser la centaine, créant un bouquet aromatique complexe qui imprègne l’air d’une profondeur à la fois spirituelle et médicinale.

Japon

Au Japon, l’encens, comme beaucoup d’objets importés du continent, a été élevé au rang d’art noble. Introduit par les moines bouddhistes venus de Chine, il fut d’abord utilisé par les religieux et même par les guerriers samouraïs, qui parfumaient leur casque d’encens aromatique avant la bataille, en un geste de respect et de préparation spirituelle face au combat.

Rapidement, les élites japonaises adoptèrent cette pratique et la transformèrent en une cérémonie raffinée appelée kōdō, comparable à la cérémonie du thé. L’encens brûlant passait dans des brûleurs spéciaux, tandis que les participants commentaient à tour de rôle ses fragrances et jouaient à deviner les ingrédients, mêlant esthétique, culture et sensorialité.

Le bois d’agar et le bois de santal constituent la base des bâtonnets d’encens japonais, enrichis d’une multitude de plantes et d’herbes aromatiques, parmi lesquelles le lys gingembre, le patchouli, l’écorce de cannelle, la réglisse, la lavande ou le carthame. Chaque combinaison est le fruit d’un savoir-faire ancestral, transformant l’encens en une expérience sensorielle et spirituelle unique.

L'encens en Amérique du Nord

En Amérique du Nord, certaines cultures possèdent une riche tradition de combustion de plantes aromatiques, bien que le terme « encens » ne soit que rarement employé. À travers les États-Unis, le Canada et le Mexique actuels, de nombreux peuples amérindiens, aux langues et coutumes variées, partageaient des pratiques similaires, notamment la combustion de plantes ou de bâtons de boue lors de cérémonies de purification rituelle.

Si la fumée du tabac est aujourd’hui célèbre pour ses origines amérindiennes, les chamans et guérisseurs utilisaient également celle des fagots de sauge du désert, de sauge blanche et d’autres herbes sacrées. Cette fumée purifiait non seulement les personnes, mais aussi les objets et les lieux, établissant un lien subtil entre le monde matériel et le monde spirituel.


bâtons de sauge

La sauge et l’armoise figuraient parmi les ingrédients les plus prisés des bâtons de fumée, aux côtés du foin, du cèdre et du tabac. Chacun possédait ses usages spécifiques au sein des traditions chamaniques nord-américaines. Les bâtons étaient brûlés lors de rituels sacrés, tels que les danses guerrières, ou pour purifier les personnes entrant dans les habitations – tipis et autres lieux de cérémonie – où se déroulaient les rites spirituels.

À travers le temps et les cultures, les odeurs agréables ont toujours eu le pouvoir de réjouir, d’apaiser l’esprit et les nerfs, de soulager après une journée de labeur. L’encens, précieux et universel, a ainsi été chéri par les figures religieuses comme par les simples mortels, et il a trouvé sa place dans les textes sacrés des grandes religions du monde, du christianisme à l’hindouisme.

Au-delà de son rôle rituel et spirituel, l’encens occupe également une place centrale dans de nombreuses pratiques occultes et magiques. Des centaines de mélanges existent, certains liés aux planètes et à l’astrologie, d’autres nécessitant la récitation de psaumes précis lors de la combustion. Mais ce fascinant univers fera l’objet d’un autre article, tant il mérite d’être exploré en profondeur.

Informations complémentaires sur les encens – Utilisation

L’usage de l’encens a sans doute débuté par un simple besoin pratique. Avant l’arrivée de l’eau courante, du savon moderne et de pratiques d’hygiène quotidiennes, les odeurs désagréables étaient omniprésentes, tant sur les individus que dans les lieux de vie communs.

L’idée selon laquelle l’encens purifie et assainit l’air semble être née de son rôle premier : masquer les mauvaises odeurs de l’atmosphère environnante. Cette fonction se retrouve dans des contextes aussi variés que les temples bouddhistes et hindous ou les cérémonies catholiques, où la résine d’encens et la myrrhe sont brûlées dans un encensoir. Les participants, souvent issus des classes populaires et n’ayant pas toujours le temps de se laver avant le service, bénéficiaient ainsi d’une atmosphère parfumée et sacrée, qui préparait l’esprit à la prière et à la méditation.

Autres usages de l'encens

En Chine, l’encens servait également de forme d’horloge ingénieuse.

horloge à encens

Les bâtonnets étaient fabriqués selon des normes uniformes, brûlant à peu près au même rythme, permettant ainsi de mesurer le temps à une époque où horloges et montres modernes n’existaient pas. Le mécanisme était simple et astucieux : un fil relié à une bille était placé le long du bâton. Lorsque le bout incandescent atteignait le fil, celui-ci se rompait et la bille tombait dans un récipient avec un bruit distinct, signalant qu’un certain laps de temps s’était écoulé.

L’encens avait aussi une fonction pratique et protectrice : éloigner les insectes indésirables. Des bâtonnets parfumés à la citronnelle, à la lavande ou à d’autres herbes, ainsi que la fumée qu’ils produisaient, repoussaient moustiques et autres parasites. Cette pratique était d’autant plus précieuse à une époque où les populations vivaient dans des environnements ruraux, où les insectes étaient omniprésents. Pour les pratiquants bouddhistes, l’encens offrait un répit indispensable pendant la méditation, empêchant les piqûres et maintenant la concentration dans le calme et la sérénité.

Base combustible

La plupart des encens reposent sur une base combustible, qui agit comme liant et permet au bâtonnet ou au cône de brûler de manière régulière et uniforme. Dans le cas de ces formes classiques, il n’est nécessaire de les allumer qu’une seule fois pour libérer leurs fragrances.

Les matériaux les plus couramment employés sont le bois ou le charbon de bois. Leur avantage réside dans leur combustion régulière et discrète, qui n’altère pas le parfum des substances aromatiques qu’ils transportent. Les gommes naturelles, comme la gomme arabique, sont également très utilisées pour leurs qualités liantes. D’autres matériaux spécifiques enrichissent la tradition selon les régions : le makko, bois japonais, le Xiangnan pi, provenant de l’écorce d’arbres du genre Phoebe, le Jigit, liant utilisé au Népal, ou encore le Laha, une poudre de bois foncé prisée dans de nombreuses contrées asiatiques. Chacun contribue à la solidité et à la régularité de la combustion, tout en respectant la délicatesse des arômes qu’il transporte.

Production

Les bâtonnets d’encens peuvent être confectionnés selon plusieurs méthodes, parmi lesquelles certaines se sont transmises de génération en génération.

L’une des techniques les plus courantes est le roulage de la pâte. La base combustible est mélangée avec les résines, poudres et huiles aromatiques pour former une pâte homogène. Celle-ci est ensuite étalée et façonnée en une bobine fine et longue à l’aide d’un rouleau, d’une palette ou d’un outil similaire. Un bâtonnet, souvent en bambou, est alors enroulé au centre du mélange. Une fois formés, les bâtonnets sont découpés à la longueur souhaitée avant d’entamer leur lent séchage, étape cruciale pour garantir une combustion régulière et la préservation des arômes délicats.


Production – autres méthodes

Le revêtement en poudre est une autre technique traditionnelle, dont les variantes sont nombreuses. En général, les bâtonnets de bois sont d’abord trempés dans de l’eau ou un mélange léger de colle.

Bâtons d'encens

Ils sont ensuite plongés individuellement dans un plateau de poudre masala – un mélange de résines, d’épices et de liants – avant d’être roulés pour assurer leur adhérence et leur stabilité. Souvent, trois ou quatre couches de poudre sont appliquées sur chaque bâtonnet, mais ce nombre peut varier selon les recettes et les préférences. Après ce façonnage minutieux, les bâtonnets sont laissés à sécher à l’air libre.

La compression constitue une autre méthode simple et économique. Une poudre masala légèrement humide est moulée autour d’un bâton de bois par simple pression. Cette technique, ancienne, reste encore largement utilisée dans la production moderne, notamment pour les encens de masse.

Enfin, une dernière approche consiste à brûler directement des résines pures, seules ou en mélange, sur un charbon ardent, libérant immédiatement leurs fragrances puissantes et intenses, comme cela se faisait déjà dans de nombreuses cultures anciennes.

Ingrédients et voyages olfactifs

Parmi les résines issues de la sève des arbres, certaines sont particulièrement prisées : le benjoin, l’oliban, la myrrhe, la manne, le copal, le mastic, et bien d’autres encore. De même, certaines plantes et bois se brûlent tels quels : la sauge, le palo santo, la lavande, le genévrier, la citronnelle, l’eucalyptus ou la cannelle, pour n’en citer que quelques-uns.

Cette liste n’est qu’un aperçu des ingrédients les plus populaires et faciles à se procurer. Mais l’encens peut être fabriqué à partir de tout ce qui libère une fragrance agréable à la combustion. Certains composants restent cependant rares, soit en raison de leur rareté naturelle, soit à cause de la surexploitation humaine, ce qui en fait des trésors précieux et coûteux.

L’odorat est l’un des sens les plus puissants de l’être humain : des études montrent que sa perte peut plonger les individus dans des dépressions plus profondes que celles associées à la surdité ou à la cécité. L’encens offre ainsi un moyen unique de percevoir le monde, de voyager à travers les senteurs de contrées lointaines simplement en allumant un petit bâton, une résine ou un cône de matière végétale. Il ouvre les portes de merveilleux voyages olfactifs et spirituels depuis le confort de sa maison.

Nous vous retrouverons bientôt pour de nouvelles explorations des encens et de leurs usages à travers le monde.


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1 commentaire

tres tres interessant, tres bien documente.merci

fortin

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